A l’origine de la révolution mécanique du houblon, un immigré allemand inventa il y a plus d’un siècle en Californie, une technologie de récolte toujours en usage aujourd’hui.
Autrefois cultivé sur des buttes individuelles, courant le long d’une perche de 3 à 4m de hauteur, le houblon était une culture parmi d’autres dans les fermes qu’on appellerait aujourd’hui “diversifiées”, nécessitant beaucoup de main d’oeuvre pour quelques grammes de cônes par pied.
Mais les évolutions dans les méthodes de culture ont été nombreuses depuis le début du XIXe siècle, reflétant les défis de l’époque, à mesure que les campagnes se vident, la production agricole se rationalise, on mécanise pour augmenter l’efficacité du travail humain, et on adapte peu à peu les exploitations agricoles à ces nouveaux enjeux.
La culture de houblon n’est pas en reste : la généralisation des structures en poteaux + câbles se fait à partir des années 1850 d’abord en Europe, puis aux USA, le travail du sol et le buttage, d’abord à cheval, puis au tracteur à vapeur
Né en 1867 dans la région du Wurtemberg en Allemagne, Emil Clemens Horst alors enfant émigre aux Etats-Unis en 1874. Il est coursier pour une usine new-yorkaise dans les années 1880, il découvre le commerce du houblon par le hasard des rencontres et fonde avec ses frères Louis et Paul la Hors Bros Company. Il décide de faire son propre chemin et déménage en Californie en 1902 et achète un bout de terrain près de Weathland en Californie, au Nord de Sacramento, où il s’essaye à la culture du houblon.
Réalisant que le climat doux et sec de la Californie offrait des conditions exceptionnelles pour la culture du houblon, il investit massivement dans des terres agricoles près de Sacramento, en vue d’y planter du houblon sur de plus grandes surfaces.
En 1904 la San Francisco’s E. Clemens Horst Company, exportait dans le monde entier grâce au port important de San Francisco, fournissant notamment les brasseries Guinness en Irlande, elle est aussi la seule entreprise de l’époque à exporter du houblon en Allemagne. Son entreprise employait plusieurs centaines de travailleurs immigrés européens, chinois ou japonais pour récolter le houblon manuellement.
Mais les conditions dans les villages de travailleurs étaient difficiles, la paie bien maigre. Ainsi, des groupes de travailleurs organisent des grèves à partir de 1905 dans les fermes voisines de Clemens pour protester contre les conditions de travail pénibles, immobilisant les séchoirs de houblon, mettant en péril les récoltes. Point culminant de la confrontation, en 1913 chez DURST HOP RANCHES, une exploitation voisine de celle de Clemens HORST, où 4 travailleurs périrent dans les manifestations.
Alors considéré comme plus grand producteur et négociant de houblon au monde, Clemens HORST entrepris de fabriquer un système de récolte mécanisée dès 1905, il déposa plus de 14 brevets sur les opérations de récolte et de séchage, il serait d’ailleurs à l’origine des séchoirs “dynamiques” à plusieurs niveaux, permettant une meilleure homogénéisation et une gestion de flux de matière facilité, invention souvent attribués aux houblonniers allemands des années 1960. Mais il a durablement transformé la méthode de récolte de houblon avec des inventions de séparateurs mécaniques, de rouleaux batteurs, de ventilateurs, de cribleurs rotatifs et de convoyeurs permettant la séparation des cônes, de la lianes et des feuilles.
Avec la Première Guerre mondiale, les échanges avec l’Angleterre furent stoppés brutalement, puis la Prohibition (1919-1933), ont fait chuter la production de houblon après 1916.
Au début des années 1920, la surface de production de houblon a été réduite de 2/3.
Clemens Horst réussit alors une reconversion de ses séchoirs à houblon pour y sécher et conserver des fruits et légumes.
Il meurt en 1940 à 73 ans, à San Francisco.
Son fils Emil Clemens Horst Junior, et son beau fils Edouard Thys reprirent le flambeau des inventions à partir de la fin de la Prohibition, qui relança la production de houblon aux USA, ils déposèrent plus de 15 brevets qui perfectionnent les machines de cueillette, de tri et de séchage du houblon, qui inspirèrent plus tard les anglais Bruff et le belge Pierre Allaeys.
Remerciements: Museum d’Histoire de Sacramento, Mac HORST, descendant de Emil Clemens HORST